Avant de désigner la communication de masse pour inciter le consommateur ou l’usager à adopter le comportement souhaité par une entreprise privée ou par l’État, la publicité signifiait la participation du peuple aux débats relatifs à l’intérêt commun. Promue par la démocratie athénienne, la publicité visait à fournir à chaque citoyen les éléments pour faire, à main levée, un choix politiquement responsable.
Prenant le parti des Lumières, ce courant culturel global contre le despotisme, Kant fait de la publicité la condition la plus inoffensive de l’exercice de la liberté, individuelle et politique. Aux dictats du chef ou du conseiller – officier, gouvernant, prêtre, médecin – doit succéder l’usage public de sa raison sous tous les rapports. Cela signifie : qu’il sorte de l’usage privé de son jugement concernant une affaire qui intéresse le peuple – les individus en tant que citoyens – en étant tenu d’exposer son avis à tous et le soumettre, ainsi, à la discussion.
Avec l’avènement des mass media, la publicité s’est muée en « pub ». Présentation conditionnante autant des biens de consommation que des idéologies régnantes, la « pub » s’est faite instrument de propagande. Avec les médias de l’image, la « pub » est devenue le nerf de la société de spectacle. Nouveau totalitarisme, cette fois-ci indolore, qui substitue l’impression à la pensée et tue la liberté, selon Guy Debord.
Le débat autour de la publicité des décisions de justice exige une réflexion de fond qui intègre le constat de Mac Luhan : le medium est le message. La technique moderne est loin d’être neutre, nous rappelle Heidegger, elle impacte le cours des choses et des idées. Le sens de la publicité est modifié par le média qui la diffuse. L’agora de jadis n’a rien à voir avec nos écrans numériques. La présence active des citoyens n’a rien à voir avec la consommation passive du spectateur en chambre. La rhétorique d’un individu n’a rien à voir avec la technologie du montage. Être perçu par quelques présents motivés n’est pas se savoir vu de n’importe qui… Alors ? Face à ce qui paraît indécidable, il nous faut davantage réfléchir avant de décider !