Janvier 2024 :
l’espoir ?

Espérer c’est miser sur le meilleur possible sans pour autant ignorer que le contraire peut arriver. L’espoir intègre l’incertitude inhérente au devenir en donnant sa confiance en l’évolution créatrice de la vie. Inquiet, l’espoir vibre d’une inquiétude qui côtoie la crainte sans jamais s’y enliser. Ainsi, il surmonte les doutes de la raison, toujours méfiante à l’égard de ce qu’elle ne connaît pas et préfère l’action à l’attente. Dans la difficulté, l’espoir voit une épreuve nécessaire, dans le problème l’amorce d’une solution. En toute circonstance, aussi inextricable soit-elle ou semble-t-elle, l’espoir parie sur l’imprévu heureux.

Au fond de l’espoir et souvent à son insu, se trouve la foi en la possibilité de ce que la raison juge improbable. En cela, l’espoir s’oppose au réalisme ordinaire qui se conforme à ce qui est. Il se distingue aussi de l’optimisme ordinaire qui, évacuant le potentiel négatif, s’obstine à optimiser. Espérer c’est prendre en mains les tiges entrelacées du présent quelles que soient leurs épines en pensant aux fleurs bariolées qui ondulent ou qui onduleront sur leurs pointes. Prendre en mains c’est aussi donner la main à d’autres, car nos rencontres tissent avec nous notre bien à venir. Espérer c’est faire confiance à la fois en les forces de la vie et dans ce que les relations authentiques peuvent offrir.

Ouverture de cœur et main à la pâte, l’espoir survit-il quand sévit une violence extrême qui ôte tout horizon et toute possibilité de mouvement ? La torture pratiquée par les systèmes tyranniques, la déshumanisation dans les camps d’extermination, les violences et les viols sadiquement pratiqués ne bloquent-ils pas, jusqu’à la détruire, la capacité d’espérer ? Que devient l’espoir quand un individu est réduit à son corps, privé de futur et sans marge de manœuvre pour l’esprit ? Le contraire de l’espoir n’est pas le désespoir. Désespérer dépend d’une certaine représentation de l’avenir et n’exclut pas l’action, le suicide étant un parmi les actes qualifiés de désespérés. « Inespérance » pourrait être le terme juste : incapacité de se penser, incapacité de se projeter dans une situation différente.

Le plus grand crime contre l’être humain n’est-il pas de priver celui-ci du pouvoir d’espérer ? La plus forte responsabilité, pour celui qui peut se projeter dans l’avenir, n’est-elle pas d’espérer en une meilleure humanité ? Plutôt que de pardonner aux voleurs d’espoir sous prétexte qu’« ils ne savent pas ce qu’ils font », plutôt que de leur rendre la monnaie de leur sinistre pièce, ne faudrait-il pas combattre nos pessimismes et nos découragements ? Miser sur le meilleur dont l’être humain est capable quand il est relié, respecté et aimé ? La paix qui, aujourd’hui, semble improbable, ne pourrait-elle pas, dans un avenir très lointain, improbablement arriver ?

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