Février 2024 :
le courage ?

Qualité du « cœur », courage n’est pas témérité. Le téméraire brave un danger plus ou moins important dont il n’a pas pris la mesure. Le courageux affronte une situation difficile ou franchement dangereuse en étant conscient des périls encourus. Souvent, l’intention du téméraire est de relever un défi afin de provoquer l’admiration. Parfois, une personne qui se pensait timorée ou que l’on croyait lâche s’avère courageuse face à une situation extrême. Le risque de mourir, réellement ou symboliquement, est à l’avant-scène ou à l’horizon aussi bien de l’acte courageux que de l’acte téméraire. L’un et l’autre sont exposés à un changement radical de situation – perdre la vie, la santé ou la face.

Habituellement illustré par des actions héroïques, fruits d’un être humain qui dépasse sa médiocrité habituelle pour défendre une cause estimée supérieure à sa condition physique ou sociale, le courage risque d’être méconnu dans ce qui constitue sa substance. Le « cœur » est un organe vital qui fonctionne sans interruption tant que nous sommes en vie. Si l’émotion en modifie le rythme, c’est que le cœur est en lien avec ce qui nous touche épidermiquement et profondément. Le trac le fait battre, le stress le crispe, l’amour le fait palpiter. L’omniprésence active du cœur nous signifie que nous avons la possibilité d’être courageux dans des circonstances qui, sans menacer notre intégrité, interpellent notre existence. Pour le vivant humain, exister c’est se distancer mentalement de sa survie physique en exerçant sa liberté.

Si le cœur est l’organe impartageable de chaque individu humain, la communication parlée est l’acte humain fondamental. Or le courage, et son opposé la lâcheté, sont le cœur de la communication inter individuelle. Dire sa pensée, exprimer son ressenti ou son désaccord, c’est s’exposer au péril d’être incompris, mal compris, méconnu, voire interdit d’une relation ou exclu d’un groupe. Mais c’est aussi s’offrir la chance d’être compris et reconnu. La peur de perdre notre confort immédiat nous porte souvent à fonder celui-ci sur des non-dits et des silences, à l’envelopper dans du papier glacé, à le préserver au prix de notre échine pliée – à nous désaccorder, en somme, avec notre cœur.

Or notre cœur a vitalement besoin autant de notre respiration physique que de notre respiration mentale. Celle-ci exige que nous expirions ce qui nous encombre ou inquiète et que nous inspirions de l’air nouveau. Le courage quotidien consiste à oser reconnaître mais aussi paraître ce que nous ressentons et pensons. En affrontant l’animal ou la forêt sauvage au lieu de mettre notre tête dans le sable nous risquons, certes, la fermeture d’une porte, mais nous créons en même temps la chance de l’ouverture d’une nouvelle voie inconnue. Symbole de la bravoure, de la justice et de la dignité, le lion redouté n’est pas notre ennemi mortel. Il est la force vivifiante en nous. Force créatrice, cadrée par notre expérience, par nos valeurs structurantes et par nos aspirations. Tant que nous ne sommes pas dans la situation du résistant dont le courage consiste à se taire pour ne pas trahir, ayons le courage de ne pas taire ce qui nous fait humainement vivre.

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